Mon Aventure à travers les Chantiers Participatifs en France
Aujourd’hui, les Français sont de plus en plus nombreux à se poser des questions sur l’habitat écologique et le mode de vie alternatif qui l’accompagne. Les projets d’auto construction écologique se multiplient et nombre d’entre eux se concrétisent à travers la pratique du chantier participatif.
Souvent le projet se manifeste par une volonté de faire soi-même et d’apprendre mais aussi pour des raisons financières ou par une volonté de se réorienter.
Mais qu’est-ce que le chantier participatif ?
C’est une pratique où se rassemblent des particuliers, des personnes volontaires et des professionnels pour construire ensemble. Elle est l’occasion de créer des liens, de se confronter au terrain et d’apprendre à construire de ses mains.
Il n’est pas rare qu’une personne voulant mettre en place ce type de projet fasse des formations théoriques et pratiques telles que celles proposées par Ghara par exemple, que ce soit sur la construction ossature bois ou la technique du GREB, mais toujours en matériaux biosourcés.
Le chantier participatif attire directement les curieux, qui soucieux de vouloir construire ensuite leur propre habitat écologique, vont apprendre sur les chantiers des autres. Le plus important est que le chantier participatif est une bonne manière d’en apprendre plus sur les techniques de construction soutenables.
Récemment diplômée d’un Master en architecture, j’ai décidé de me lancer dans une aventure personnelle :
Traverser la France à la découverte des chantiers participatifs. Vous me direz, qu’est-ce qui pousse une jeune diplômée à partir faire du bénévolat dans toute la France quand elle peut profiter de son Master et se lancer dans une vie d’architecte ?
Et bien je vais vous le dire. Au cours de mes deux années de Master à l’école d’architecture de Marseille que je me suis initiée à l’architecture frugale et à l’éco-responsabilité. Notre enseignement en projet nous incitait à régulièrement requestionner la pratique de l’architecte et à nous requestionner nous-même sur l’architecte que l’on souhaite devenir.
C’est alors que je me suis posé les questions suivantes : Qu’est-ce que l’architecture ? Que signifie être un bon architecte ? Il pourrait exister autant de réponses qu’il y a d’architectes dans ce monde.
Personnellement j’aime à comparer l’architecture à la chirurgie. Un chirurgien ne peut exercer son métier sans pratiquer des opérations à répétition et plus il exerce, plus il excelle.
C’est à mon sens la même chose pour l’architecture : un bon architecte serait celui qui pratique le terrain.
Et il y a t-il meilleure façon de pratiquer le terrain que par les chantiers participatifs ? L’idée a alors germé dans mon esprit. Et si j’allais me chercher en pratiquant la matière de mes mains ! J’avais envie de mettre les mains dans la terre, toucher le bois, la pierre, mais aussi de faire des rencontres.
Avant de commencer, j’étais très loin d’imaginer ce que mes chantiers allaient vraiment m’apporter dans ma vision du monde et dans ma vision de mon métier.
Etape 1 : Trouver les chantiers participatifs
J’ai décidé de partir de mon Sud Marseillais et de traverser la France pour rejoindre de la famille dans le Cap Sizun, en Bretagne. Pour trouver des chantiers participatifs il existe de nombreuses façons de faire, il n’en manque pas en France.
Mais c’est par le réseau Twiza, recommandé par une amie architecte, que je vais chercher. C’est un réseau qui met en relation des particuliers ayant un projet de construction d’habitat écologique, des professionnels de l’éco-construction, des volontaires voulant pratiquer le chantier.
Son fonctionnement est assez simple : Cela ressemble un peu à un réseau social, les particuliers créent leur page de présentation de leur projet, avec photos, actualités du chantier et description détaillée et le situent sur une carte de France modélisée par le site.
La description se compose en plusieurs catégories :
- une petite biographie des hôtes (description rapide de leur métier et de leur vie),
- une explication sur le chantier, des éventuelles tâches à effectuer,
- les équipements de protection individuelle qu’il faut prendre ou non,
- le matériel dont ils disposent,
- l’hébergement qu’ils proposent aux volontaires,
- la cadence de travail du chantier.
Les volontaires, ont également leur profil avec les chantiers qu’ils ont déjà éventuellement fait, une petite description et une photo afin de mettre en confiance les particuliers.
Ils ont accès à la carte et peuvent ainsi choisir le chantier qui les intéresse et contacter le particulier via le réseau.
C’est ainsi que je procède pour planifier mon périple de 2 mois et demi.
Il existe un très grand nombre de chantiers différents sur le réseau. La plupart d’entre eux concerne la construction neuve d’une maison tandis que d’autres concernent de la rénovation ou réhabilitation de ferme, ancienne maison, cidrerie, usine et autre type de bâti abandonné.
Certains sont également très atypiques avec par exemple la construction d’un prototype de maison flottante. Ils peuvent varier selon le moment où on les consulte également.
Certains viennent de commencer et n’en sont qu’aux fondations voire au terrassement tandis que d’autres en sont aux derniers enduits intérieurs ou bien aux menuiseries.
Selon ce que l’on cherche, on peut trouver notre bonheur dans n’importe quel chantier. Il existe également une variété de techniques très grande permettant de voir et de travailler sur des choses très différentes.
Avant de parler de la planification de mon trajet, je vais citer quelques techniques de construction atypiques que l’on peut trouver sur le réseau Twiza.
1. Paillourte
Comme son nom l’indique c’est une technique consistant en la construction d’une yourte en paille.
La paille ici joue le double rôle de structure porteuse et d’isolant, favorisant une économie de matériau et une pensée frugale de l’habitat.
Cette image d’un des chantiers de Twiza témoigne de cette technique.
On peut observer les murs de paille mais aussi la charpente réciproque en bois massif qui viendra soutenir la toiture et abriter la famille qui y vivra.
2. Earthship
C’est une technique de plus en plus courante dont les critères principaux sont l’état semi-enterré de la maison et les murs en pneus usagés remplis de terre compressée.
Elles sont également caractérisées par leur forme basse et allongée, offrant une orientation Sud et impliquant une disposition des pièces en enfilade.
Ces maisons sont aussi appelées « géonef » car « géo » traduit ce qui vient de la terre et le mot nef se traduit par la forme en longueur de la maison.
Généralement les murs sont en bouteilles de verre récupérées mais les techniques sont variées et nombreuses.
3. Technique de Torchis
Le torchis est un mortier composé de terre et de paille. Il s’apparente à un béton naturel et est utilisé uniquement en remplissage.
Il existe plusieurs techniques de pose du torchis mais celle que je connais consiste en la création de boudins de terre qui sont ensuite empilés entre les montants de l’ossature bois.
C’est une technique ancestrale souvent utilisée dans les anciennes fermes et maisons à colombage car elle forme un très bon remplissage.
Cependant ce matériau biosourcé est très sensible à l’humidité et doit pouvoir respirer, il faut faire attention à l’isolation employée
4. Kerterre
Le Kerterre est une construction à base de chaux et de chanvre. Elle s’apparente à de la sculpture plus qu’à de la construction pure, ce qui permet de forger son habitat à la forme que l’on souhaite avec nos propres mains.
Souvent sous forme de dôme organique, l’habitat se décompose en plusieurs dômes formant les différentes pièces.
Du fait que ces habitats soient considérés comme des sculptures, il n’est pas nécessaire d’avoir de permis de construire.
Techniquement, le kerterre est assez simple, il consiste à l’empilement successif de boudins de fibres et de chaux.
Ces techniques représentent seulement une petite partie des nombreuses possibilités offertes par les chantiers participatifs. Personnellement je suis allée chercher d’autre types de construction.
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Etape 2 : Planifier mes chantiers participatifs
Je remplis alors mon adhésion sur le réseau me permettant ainsi d’être assurée par la structure et cherche sur la carte les chantiers qui me plaisent en gardant mon objectif final bien en tête : rejoindre la Bretagne.
Après avoir choisi une dizaine de chantiers, je contacte par message via le réseau puis par téléphone mes futurs hôtes, jusqu’à réussir à planifier 4 chantiers participatifs.
J’ai fait le choix de limiter mes chantiers à 4, et d’y rester entre 1 semaine et demi et 2 semaines pour me donner le temps de créer du lien et de voir différentes choses au sein d’un même chantier.
Les chantiers que j’ai choisis sont les suivants :
- Réhabilitation et émergence d’un éco-lieu
Gordes (Vaucluse, 84)
Du 6 au 19 Mars – 2 semaines
- Eco-construction en ossature bois et paille
Tulle (Corrèze, 19)
Du 20 Mars au 2 Avril – 2 semaines
- Autoconstruction de 2 maisons autonomes en GREB
Plouray (Morbihan, 56)
Du 13 au 21 Avril – 1 semaine et demi
- Réhabilitation complète d’un corps de ferme
Ergué Gaberic (Finistère, 29)
Du 1er au 12 Mai – 1 semaine et demi
Etape 3 : Chantiers participatifs : bien se préparer et s’équiper !
Une fois la planification terminée, je dois m’équiper en fonction de ce que mes futurs hôtes ont, ou n’ont pas à me fournir. Je pars donc avec :
- Une caisse remplie d’EPI (Équipements de Protection Individuelle) incluant lunettes de chantiers, 3 paires de gants courts et longs pour le mortier, bouchons d’oreille, chaussures et casquette de sécurité
- Quelques outils : visseuse, cutter, mètre ruban et crayons de chantiers
- Des vêtements de protection : 2 pantalons de survêt, plusieurs T-shirt et polaires, une veste sans manche et des vêtements étanches (anorak, pantalon et bottes de jardinage)
- Équipement pour dormir (un des chantiers est sous tente) : une tente 3 secondes, une couverture, un duvet et un coussin
Calendrier terminé, équipement prêt, je me lance dans l’aventure. C’est donc le 6 mars 2023 que débute mon voyage français autour des chantiers participatifs qui feront chacun l’objet d’un nouvel article.
PAULINE GALLARDO
Architecte D.E